LE TEMPS ORDINAIRE - HOMELIES

28-29 Janvier 2023  

Homélie pour le 4è dimanche du temps ordinaire, année A

Cher(e)s ami(e)s,
Lorsqu’avec notre curé Laurent j’ai participé au calendrier des homélies, j’ai choisi en fonction des dates, et non des textes, et je dois vous avouer qu’avec les lectures de ce 4è dimanche du Temps ordinaire, j’ai rencontré des difficultés. Car l’évangile des Béatitudes est très connu, mais en même temps difficile à comprendre, et puis aussi avec la Première Lecture et saint Paul, on est plongé dans des oppositions, des paradoxes : le prophète Sophonie met en valeur la pauvreté, mais parle de la colère du Seigneur ; chez Paul, on lit : « Ce qu’il y a de fou dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi, pour couvrir de confusion les sages ». Si on prend le temps d’aller voir la version des Béatitudes chez Luc, on trouve des oppositions encore plus fortes, entre les « heureux » et les « malheureux » : « Heureux, vous les pauvres... Mais malheureux, vous les riches... Heureux, vous qui avez faim maintenant... Malheureux, vous qui êtes repus maintenant... »

L’Eglise a beaucoup insisté dans le passé sur cette notion de faiblesse, de petitesse, de souffrance. Longtemps on en a fait comme une épreuve obligatoire, pour nous racheter de notre condition de pécheurs. Vous avez peut-être regardé mercredi soir sur la chaîne Arte le film « La religieuse », qui nous montre une jeune fille contrainte par ses parents d’entrer au couvent et qui doit notamment faire l’expérience du « silice », cette semelle de pointes qu’on se met aux pieds pour souffrir en marchant, et de cette façon se rappeler sans cesse que nous sommes pécheurs...

C’est vrai, il y a bien une béatitude qui dit : « Heureux ceux qui pleurent, car ils seront consolés ». Mais sommes-nous obligés de pleurer pour être sauvés ? Je ne crois pas que ce soit ce que veut dire Jésus. Je remarque d’abord qu’ici Jésus emploie neuf fois le mot « heureux » : n’est-ce pas pour notre bonheur que Dieu nous a créés ? Plus exactement, je crois, pour avoir des vis-à-vis avec qui Il puisse partager son Amour. Alors, de ce fait, Il nous appelle à collaborer avec ce magnifique projet. Certes, Il nous laisse libres de répondre positivement ou non à Son appel ; et puis, il y a encore ceux et celles qui n’ont pas entendu cet appel. Alors, si on regarde la vie du simple point de vue humain, être heureux c’est devenir riche, c’est être chef, avoir le pouvoir ! Je ne vais pas ici me lancer dans des considérations politiques, mais je constate simplement qu’on peut comprendre que bon nombre de personnes veuillent s’en prendre aux plus riches, aux « Gafa » par exemple qui se font des milliards en exploitant les technologies modernes. Eh bien, ce n’est pas à la richesse en elle-même que s’en prend Jésus, mais à son usage. S’il fait l’éloge des petits, c’est qu’aux yeux de Dieu toute créature a sa valeur. Oui, il y a ceux et celles qui pleurent, et ils seront consolés : je pense à tous ceux et celles qui souffrent de la guerre en Ukraine, et ici nous n’y pouvons pas grand-chose, mais nous savons que Dieu les regarde avec tendresse. Et il y a ceux qui se battent, « les artisans de paix », « ceux qui sont persécutés pour la justice », il faudrait plutôt dire ici « celles qui se battent pour la justice » si on pense aux Iraniennes qui se sentent opprimées dans leur pays. Et nous aussi, modeste communauté du Nord de la France, nous avons à prendre notre part, avec un « cœur pur », aux efforts de notre société pour rendre la vie meilleure à tous les niveaux : l’environnement, la vie sociale, l’élévation de chacun et de chacune par l’enseignement, la culture, des loisirs constructifs.

Les Béatitudes ne sont pas une menace, mais un appel. Au reste, c’est ce qui ouvre ce qu’on appelle « le discours sur la montagne », où Jésus donne l’essentiel de son enseignement, avant de parcourir son pays, en marche vers Jérusalem. Mettons-nous à sa suite, car la route qu’il prend n’est pas toujours facile, mais c’est celle du vrai bonheur, de la vraie Vie à laquelle son Père nous propose de participer ! Amen.

P.Maincent